Pourquoi l’oeuvre Le Radeau de la Méduse a-t-elle fait scandale ?

Géricault, Le Radeau de la Méduse, 1818-1819, 491x716,  huile sur toile, Musée du Louvre, Paris.  Source : http://www.wga.hu/index1.html

Figure 1 : Théodore Géricault, Le Radeau de la Méduse, 1818-1819, huile sur toile, 491×716, Paris, Musée du Louvre. Source : http://www.wga.hu/index1.html

En 1819, le peintre Théodore Géricault présente son œuvre Le Radeau de la Méduse ( figure 1) au Salon et le public est choqué. L’œuvre est extrêmement critiquée. L’artiste prend pour sujet un événement d’actualité qui n’avait pas laissé le peuple français insensible. En effet, en juin 1816, La frégate La Méduse Amirale, prend le large direction le Sénégal pour reprendre le territoire aux Anglais. À son commandement, on y retrouve le Comte de Chaumareys. Un mois après son départ, la frégate s’échoue et le capitaine abandonne son navire y laissant environ 150 membres d’équipage à bord. Pour se sauver, ils prennent place sur un radeau de 20mètres sur 7mètres qui sera remorqué par les autres embarcations de secours. Mais les amarres se rompent et la plupart des hommes meurent noyés. C’est un épisode qui fut un véritable massacre puisque les autres, saouls ou pris de folie s’entre-tuent et mangent les cadavres. Le cauchemar s’arrête lorsque le navire l’Argus arrive pour les secourir, il ne retrouve que 15 hommes mourants sur le radeau, seulement 10 pourront être réanimés (1). L’évènement prend alors une très grande ampleur et les français blâment le gouvernement d’avoir choisi le Comte de Chaumareys comme commandant puisqu’il n’avait plus navigué depuis des années. Ce dernier comparaît alors devant la justice et il est radié de l’armée puis condamné à trois ans de prison. Pour réaliser cette œuvre, Géricault entreprend un travail très minutieux. Pendant trois ans, il consulte les documentations sur le drame et interroge deux survivants, Corréard et Savigny, qui lui décrivent le déroulement exact de la scène. Il réalise une maquette en cire et va même jusqu’à étudier les cadavres dans son atelier (2) . Le réalisme des corps en torsions, affamés, inconscients et désespérés est tel que le public est frappé par l’horreur de la scène alors bien loin du beau idéal de l’époque. L’œuvre choque l’assistance et est considérée alors comme un manifeste anti néoclassicisme et prônant une esthétique pro réaliste. De plus, alors que certains y voient un message politique contre le pouvoir rappelant alors l’indignation du peuple français au moment du drame, d’autres, y décèlent aussi une allusion à la dérive du peuple français sous La Restauration. Les royalistes iront même jusqu’à s’exclamer : « Rien de touchant, rien d’honorable pour l’humanité morale ; on dirait que cet ouvrage a été fait pour réjouir la vue des vautours ! » (3) devant ce tableau, qui, plus que l’épisode de violence et de cannibalisme, représente surtout un moment d’espoir perdu. De plus, la figure de l’homme noir au sommet de la pyramide apparait comme un message de l’artiste contre l’esclavagisme.

Cependant, le tableau sera très bien accueilli en Angleterre où il sera exposé en 1820.

A.L.B.

(1) http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=136
(2) http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/le-radeau-de-la-meduse
(3) http://www.latribunedelart.com/gericault-le-radeau-de-la-meduse-et-l-ideologie-du-seul-but-d-art

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